Saturday 11 July 2009

xinjiang: exacerbations des dissidences internes?

http://www.bulle-immobiliere.org/forum/viewtopic.php?f=4&t=49068&sid=59f4f26f7f5c41577794b95bf5981f20&start=250

Xinjiang : la dissidence ouïghoure pourrait être manipulée par les luttes de pouvoir qui se jouent à Pékin.


La Chine demande une collaboration internationale pour combattre "les organisations terroristes étrangères" responsables des émeutes.

L'agence Xinhua laisse pourtant filtrer que l'organisation des émeutes pourraient avoir été sous-traitées à des mafias locales liées à des intérêts politico-économiques chinois.


Il existe désormais deux versions des autorités chinoises concernant les émeutes du Xinjiang. Au discours officiel faisant porter la responsabilité sur la dissidence en exil s'ajoutent quelques suggestions officieuses laissant supposer une possible organisation locale des tueries pour préserver certains intérêts politico-mafieux.

Officiellement, le gouvernement chinois déclare désormais disposer de preuves selon lesquelles les personnes suspectes d'avoir provoqué les émeutes "ont été entraînés par des organisations terroristes étrangères". Les émeutes ont un contexte politique "profond" et Pékin appelle à une coopération internationale concrète contre "les trois force intérieures et extérieures du terrorisme, du séparatisme et de l'extrémisme" qui seraient à l'origine des évènements.

Le communiqué des Affaires Etrangères souligne en particulier "qu'il ne doit pas y avoir deux poids, deux mesures", sous-entendant que la lutte international contre le terrorisme islamique doit également s'appliquer au séparatisme ouïghour. Au-delà d'une collaboration régionale dans le domaine de l'anti-terrorisme , il semble que Pékin souhaite également obtenir que le Congrès Mondial Ouïghour, la principale organisation regroupant les dissidents ouïghours en exil, soit inscrit sur la liste des organisations terroristes, les avoirs de l'organisation et de sa Présidente, ancienne huitième fortune de Chine désormais réfugiée aux Etats-Unis, placés sous séquestre et ses activités réprimées.

Evidence shows Rebiya Kadeer behind Urumqi riot: Chinese gov't
Xinhua
9 juillet 2009
http://news.xinhuanet.com/english/2009- ... 676293.htm

Dans le même temps, pourtant, Pékin refuse pourtant la proposition turque, annoncée mercredi, de saisir le Conseil de Sécurité aux Nations-Unies sur la situation au Xinjiang. Selon le Porte-Parole du ministère chinois des Affaires Etrangères, "le Gouvernement chinois a pris des mesures décisives en respectant les lois. C'est une affaire purement intérieure à la Chine qui ne nécessite pas de discussion au Conseil de Sécurité".

D'un côté un appel à une coopération internationale dans "la lutte contre le terrorisme" au Xinjiang, de l'autre le refus d'accepter toute discussion politique à ce même niveau international.

De fait, l'agence Xinhua fait passer par ses canaux officieux une seconde analyse concernant ces émeutes. Elle suggère que les enquêtes en cours s'attachent à rechercher des preuves que l'organisation des troubles pourrait avoir été sous-traitée à des mafias locales liées à certains intérêts politico-mafieux au sein même des autorités chinoises.

Peu de choses viennent à l'appui de cette hypothèse si ce n'est un faisceau d'informations ténues que laisse filtrer Xinhua.

Il y a d'abord cette première déclaration le mardi 7 juillet du Ministre chinois de la Sécurité Publique à Pékin, juste avant de partir en mission d'inspection à Urumqi, mandaté, c'est assez rare pour être souligné, à la fois par le Parti Communiste et par le gouvernement chinois. Il est important de préciser que ce Ministre est un haut fonctionnaire, membre de l'équipe du Premier Ministre, et non pas le véritable chef de la sécurité chinoise, responsabilité dévolue à Zhou Yangkang, n°9 du comité permanent du Politburo, qui s'est également rendu au Xinjiang mais seulement jeudi, après la réunion d'urgence de mercredi soir du Comité Permanent, pour laquelle le Président Hu avait annulé sa présence au G8 en Italie.

La déclaration de Ministre de la Sécurité Publique ne doit rien au hasard. C'est une analyse de la situation d'Urumqi en termes choisis, telle qu'on peut supposer que Pékin souhaite la présenter officieusement.

Citer:
Chinese police chief urges tough crackdown on gangsters
Xinhua
7 juillet 2009
http://news.xinhuanet.com/english/2009- ... 669777.htm

Beijing, 7 juillet (Xinhua) – Le Chef de la Police de Chine a demandé mardi aux autorités de police de l'ensemble du pays de prendre des mesures pro-actives et répressives contre les groupes mafieux pour le 60ème anniversaire de la fondation de la République de Chine.

Les forces de police doivent se concentrer sur les principaux groupes mafieux et éradiquer "le parapluie protecteur" qui les soutient, selon le chef de la police.

Les forces de police doivent empêcher le Parti Communiste et les officiels gouvernementaux de toute corruption par ces organisations souterraines, et de même empêcher ces organisations de manipuler les élections locales et autres questions politiques par la violence, les menaces et la corruption, selon Meng.

Le responsable a également demandé aux départements du commerce, des impôts, des finances, de la construction et du foncier une entière coopération dans la répression des gangsters.

La remarque de Mr. Meng est effectuée deux jours après de graves émeutes dans la région autonome Ouïghoure du Nord-Ouest dans lesquelles 156 personnes ont été tuées et plus de 1000 blessées.


Il y a également cette dépêche par allégorie, publiée ce même 7 juillet, concernant cette fois une fusillade lundi à Miami, où "trois hommes en noir" ont tiré sur les participants d'une fête d'anniversaire (12 blessés dont trois dans un état grave).

L'information semble avoir été choisie pour insister à la fois sur les risques, à nouveau, concernant le 60° anniversaire de la République Populaire à l'automne et suggérer une volonté similaire lors des émeutes du Xinjiang. Le fait de décrire les tireurs de Miami comme "des hommes en noir" pourrait signaler le rôle trouble de certains personnels des unités spéciales de la police chinoise à Urumqi (uniforme en noir pour ces unités de la police contre treillis moucheté pour les unités anti-émeutes de la police armée et contrôlées par le Président Hu – voir ci-après) lors des émeutes.

Il est tentant mais difficile d'en déduire que les certaines unités de police aurait tiré sur les émeutiers ouïghours dimanche soir, malgré les consignes de modération de Pékin, ou bien, pire encore, qu'elles auraient sciemment tenté d'envenimer plus encore la situation.

Nous nous trouverions alors dans un cadre similaire à celui des émeutes de 2008 au Tibet, dont le gouvernement chinois, selon le magazine français l'Express et [url= viewtopic.php?f=4&t=49068&p=683064&hilit=Tibet#p683064] rapporté par Bulle Immobilière le 24 décembre 2008, avait communiqué "à certaines ambassades" des vidéos montrant un officier de police habillé en civil et couteau à la main, incitant aux émeutes.

Cette référence au rôle possiblement manipulateur de certains responsables de la police d'Urumqi, voir sur leur implication directe en tirant sur les émeutiers malgré les consignes, semble également présente dans le compte-rendu de la visite d'inspection mercredi 7 juillet de ce même Ministre chinois de la Sécurité Publique.

Meng Jianzhu porte tout d'abord un jugement nuancé sur la répression à mettre en œuvre, distinguant entre les animateurs des émeutes, à réprimer au plus sévère, et les émeutiers improvisés, "trompés par les séparatistes", qui doivent être traités quant à eux "sur la base de la persuasion et de l'éducation". Confirmation de l'extrême prudence de Pékin visant à tout faire pour éviter que ne s'enclenchent des cycles d'émeutes et de contre-émeutes raciales.

- Selon Xinhua, Meng Jianzhu, normalement seulement responsable de l'appareil d'Etat, a été cette fois mandaté à la fois par le Conseil d'Etat et par le Parti Communiste pour "visiter les officiers de la Police locale, les membres du personnel de la Police Armée et veiller les victimes".

La dernière phrase de l'article, placée en conclusion pour en renforcer l'importance, déclare que Meng, accompagné du Chef du Parti Communiste du Xinjiang et du Gouverneur de la Région Autonome, a rendu visite à la famille du fonctionnaire de la police armée "tué par les émeutiers".

Pourtant, la photo accompagnant la dépêche montre le Ministre passant en revue les Officiers de Police (les hommes en noir) et non pas la Police Armée (en treillis de camouflage). Le Ministre loue "la bravoure et le sacrifice" des unités de la Police Armée mais est photographié passant en revue les unités de police.

Ces suggestion semblent bien confirmer qu'une enquête au plus haut niveau est actuellement en cours sur le rôle possiblement trouble de certaines unités de la police. La hantise du Président Hu et de son Premier Ministre est de faire les frais d'une tentative de déstabilisation téléguidée non pas tant par les opposants ouïghours, en l'occurrence manipulés, mais bien par certaines factions du pouvoir politique chinois hostiles à la nouvelle équipe, afin d'enclencher des cycles de violence communautaires et de haine raciale qui affaibliraient l'équipe gouvernementale et pourraient servir de prétexte à un renversement lors du 60° anniversaire de la Chine Communiste à l'automne.

L'incroyable contre-manifestation, mardi après-midi, de colons Han armés de pelles et de hachoirs et cherchant à tuer des Ouïghours paraît renforcer cette approche. Il est impossible de croire au caractère spontané d'une telle démonstration. Urumqi est totalement quadrillée par les forces anti-émeutes et tout rassemblement armé, qu'il soit Ouïghour ou Han, fûsse-t-il avec des armes de fortune, ne peut s'agglomérer sans un certain degré de tolérance des unités anti-émeutes responsables du secteur concerné

Seul un décompte ethnique des 156 morts et 1100 blessés (selon Xinhua) permettrait de disposer d'un "indicateur", aussi tragique soit-il, des pertes de part et d'autre des deux communautés ouïghours et han et ainsi mieux comprendre ce qui s'est passé. Ces données sont à la disposition des autorités chinoises mais restent confidentielles.

Image

Citer:
Chinese police chief urges hardline crackdown on thugs in Xinjiang riot
Xinhua
7 juillet 2009
http://news.xinhuanet.com/english/2009- ... 675177.htm

URUMQI, July 8 (Xinhua) -- China's top police officer on Wednesday urged no leniency in the punishment of thugs who took part in the Urumqi riot.

Meng Jianzhu, state councilor and public security minister, made the remarks when visiting local residents injured by the rioters and family members of those victims in Urumqi, capital of northwest China's Xinjiang Uygur Autonomous Region.

Leading rioters should be punished with the utmost severity and those taking part in the riot, who were provoked and cheated by separatists, should be given persuasion and education, Meng said.

Commissioned by the Communist Party of China Central Committee and the State Council, Meng also visited local police officers and members of the Armed Police personnel and mourned for the victims.

Meng said that adequate evidence proved that the riot was masterminded and remotely controlled by overseas separatists and it was a serious struggle to maintain national unity against separatism.

He called on residents of all ethnic groups to be united after the riot since the intention of the separatists who plotted the riot was to stir up racial confrontations.

Accompanied by Xinjiang Communist Party chief Wang Lequan and regional government chairman Nur Bekri, Meng also visited the wife and parents of Wan Jingang, a member of the Armed Police killed by rioters on July 5. Meng praised Wan's bravery and sacrifice.


C'est ce même contexte de suspicion qui pourrait expliquer l'annonce, le 7 juillet, de ce qui apparaît comme la réactivation de l'enquête sur les ratonnades anti-ouïghour de juillet dans l'usine de jouet du sud de la Chine avec 15 nouvelles arrestations, postérieurement aux émeutes d'Urumqi.

Là-encore, au-delà de la seule volonté du gouvernement de montrer aux populations ouïghours que les autorités prennent tout aussi au sérieux la répression des auteurs de ces ratonnades, tout semble se passer comme si les autorités chinoises cherchaient en arrière plan d'éventuels commanditaires des évènements du Guangdong (officiellement 2 tués et 120 blessés dont une trentaine encore hospitalisés "dans un état stationnaire") qui auraient eu pour objectif de préparer le terrain à une montée des haines ethniques.

Une nouvelle dépêche, cette fois du 9 juillet, reprend certaines informations clefs, selon Xinhua, des évènements de l'usine de jouet. Suite à un traçage des messages sur les forums Internet, il apparaîtrait qu'un jeune chinois Han aurait posté, le 16 juillet, la rumeur à l'origine des émeutes du viol de deux chinoises par huit ouvriers ouïghours. Une autre information ambivalente fait état d'un message d'un autre internaute, cette fois au lendemain de la ratonnade, rapportant la mort de 8 ouïghours battus à mort.

17 personnes au total auraient été arrêtées en lien avec les "rumeurs" internet. Selon le Vice Directeur de la la Sécurité Publique de la ville, "certains feront face à 15 jours de rétention administrative". 15 jours pour mener l'enquête et disséquer sequence par sequence le déroulement des évènements.

Chine/Guangdong: 15 suspects arrêtés suite au conflit qui a provoqué les émeutes au Xinjiang
Xinhua
7 juillet 2009
http://french.news.cn/societe/2009-07/07/c_139201.htm

Rumor-mongers express remorse over fabrications about factory brawl
Xinhua
9 juillet 2009
http://news.xinhuanet.com/english/2009- ... 681799.htm

Le parallélisme est en tout cas troublant avec les méthodes de construction d'une haine identitaire débouchant sur une guerre civile, telle qu'on a pu la constater par exemple au début des conflits de l'ex-Yougoslavie.

On peut y rajouter que des vidéos des émeutes ont été abondement diffusées à travers toute la Chine par la télévision publique CCTV, dont le Président avait été abruptement remplacé le 15 mai ( viewtopic.php?f=4&t=49068&p=795359&hilit=cctv#p795359 ) par un inconnu tout droit sorti du département de la propagande, dépeint par l'iconographie comme un politique pur et dur, sans qu'il soit pour autant possible de déterminer de quel faction politique le nouveau directeur dépende.

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Jiao Li est nommé directeur de la Télévision centrale chinoise
Le Quotidien du Peuple
18 mai 2009
http://french.peopledaily.com.cn/Chine/6660047.html

Dans le même esprit, le Gouvernement local du Xinjiang a rendu public mardi un dossier de 10 photos venues de l'enfer, compétition de violence, têtes éclatées et corps massacrés. Cette url est un témoignage très dur, nul n'est obligé d'aller voir au-delà de la première photo.

Les autorités chinoises semblent désormais tout autant redouter une reprise des émeutes à Urumqi que des exactions contre les migrants du Xinjiang dans les grandes villes chinoises, bombardées d'images des évènements et alors même que la population Han du Xinjiang fuit désormais en masse la région et propage à travers le pays des témoignages poignants de la soirée d'horreur.

Le diner organisé symboliquement par le Secrétaire du Parti Communiste de Shanghai dans un restaurant ouighour de la ville, apparemment mercredi soir, peut être ainsi doublement compris comme une volonté d'apaiser d'éventuelles tensions de la population Shanghaienne mais également comme une façon, pour la faction de Shanghai, de se distancier publiquement des évènements d'Urumqi à l'intention de leurs partisans à travers le pays. Ou c'est peut-être une nouvelle tentative de désinformation.

Dès lors, media fauteurs de guerre ou bien medias facteurs de paix ?

C'est également en ces termes qu'il faut comprendre l'invitation surprise, dès lundi, de la presse internationale à Urumqi. Les journalistes étrangers de plus de 60 medias ont été immédiatement invités à se rendre massivement au Xinjiang, le lendemain des émeutes, où un centre de presse a été mis à leur disposition ainsi que toutes les facilités Internet nécessaires pour effectuer leurs rapports (l'Internet étant par ailleurs déconnecté pour le reste de la population d'Urumqi).

Il ne faut pas y voir à mon sens la seule volonté de Pékin de créer un contre-feu dans la guerre de l'information- désinformation qui l'oppose aux dissidents ouïghours, tant en exil qu'en Chine.

L'autre motivation repose sur la volonté de disposer au plus vite de témoins étrangers professionnels sur place, de façon à pouvoir rendre compte en direct de la situation pour éviter toutes provocations et distorsions des faits qui pourraient envenimer la situation tant à Urumqi qu'à travers la Chine.

Quant à ces mêmes dissidents, confrontés à une entreprise de sinisation dont nous ne sommes encore qu'aux prémices, ils risquent bien d'être les marionnettes ensanglantées des luttes pour le pouvoir qui se trament à Pékin sur des enjeux qui les dépassent.

L'urgence d'Urumqi et le spectre des embrasements ethniques ont aujourd'hui pris le pas sur la réforme de la Gouvernance mondiale dans les esprits des leaders chinois.




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