http://www.rue89.com/2009/12/27/yves-boisset-il-est-exclu-de-faire-un-film-sur-sarkozy-131360
Yves Boisset : « Il est exclu de faire un film sur Sarkozy »
David Servenay
Pour Rue89, le cinéaste des bas-fonds de la société analyse la résurgence actuelle des films sur les « affaires ».
Voilà plus de 40 ans qu'Yves Boisset filme les bas-fonds de la société. Polar, espionnage ou reconstitution historique, le cinéaste reste passionné par les faits divers qui révèlent une époque. Pour Rue89, il analyse l'actuelle résurgence des films sur les « affaires ». Entretien.
Une réjouissante résurgence du cinéma engagé
Il faut aller jusqu'à Neuilly-sur-Seine (à deux pas du siège de la DCRI [1]) pour rencontrer Yves Boisset dans son antre enfumé. A 70 ans, le réalisateur fourmille de projets, même s'il vient d'essuyer trois refus pour des raisons pas toujours très avouables. Pas grave : avec 50 films au compteur, il ne regrette pas les « plus de 200 scénarios » écrits qui n'ont pas trouvé preneur.
D'autant que l'automne a été riche : de »l'Affaire Farewell » [2] à « Une affaire d'Etat », le cinéma français semble redécouvrir la richesse du thriller politique. Une nouvelle réjouissante pour l'auteur du « Juge Fayard dit le Shériff » (l'histoire de l'assassinat du juge Renaud) en 1977 ou de « l'Attentat » (l'affaire Ben Barka) en 1970.
Réjouissante et amère, car aucun de ces récents films n'a eu de succès, malgré une excellente critique et une distribution prestigieuse. Là où les films de Boisset faisaient des cartons d'audience dans les années 70. Les Français seraient-ils devenus insensibles au cinéma engagé ? (Voir la vidéo)
Evidemment, ces échecs commerciaux ne risquent pas de motiver les financeurs du cinéma que sont les principales chaînes de télévision et les grands distributeurs.
Plus efficace que la censure, le contrôle par le financement
C'est l'autre raison du constat désabusé dressé par Yves Boisset. Pour le cinéaste, la dernière réforme du financement des films, conduite par le ministre socialiste du Budget Michel Charasse, a rendu impossible la réalisation de projets politiquement incorrects :
« En quatre ou cinq coups de téléphones, aux responsables des chaînes de télé et aux distributeurs, vous stoppez net un projet. »
Cela explique en grande partie pourquoi il a délaissé le cinéma pour la télévision, à partir de la fin des années 80. Et pourquoi plusieurs projets lui ont été refusés, pour des motifs politiques. Dans l'ordre, il en cite quatre :
- un film sur la mort de Pierre Bérégovoy
- un film sur l'assassinat de René Bousquet
- un film sur l'affaire de Toulouse
- un film sur l'affaire des disparues de l'Yonne
Malgré son goût pour les affaires tordues -hérité d'une période où, étudiant, il grattait du fait divers pour le journal Paris Jour- il trouve de plus en plus compliqué de « témoigner » sur les histoires de notre époque :
« Jamais, dit-il, le cinéma et la télévision n'ont été aussi étroitement encadrés. » (Voir la vidéo)
La presse n'ose plus intervenir dans la politique
Dernière cible dans le collimateur d'Yves Boisset : la presse. Même le Canard Enchaîné, souligne-t-il, a perdu de sa superbe :
« Cela fait des années que le Canard n'a pas sorti une grande affaire. Et puis regardez les couvertures des hebdomadaires, c'est saisissant : ils font tous la même chose, les franc-maçons au printemps, la crise immobilière à l'automne. »
Dans ce contexte pas facile pour les journalistes (qu'il distingue de leurs médias), le pouvoir politique n'a aucun mal à imposer son tempo. Faire un film sur Sarkozy, ses amitiés, ses réseaux… c'est possible ?
« La seule solution serait de pouvoir faire un dessin animé qui traiterait les affaires actuelles. Mais il est complètement exclu de faire, directement ou indirectement, un film sur Sarkozy. Si vous vous présentez avec un projet de ce type, on vous prendra pour un fou dangereux. » (Voir la vidéo)
Rachida Dati qui s'embête au Parlement européen [3], il n'est pas encore convaincu par les expériences menées ici ou là, chez nos amis de Bakchich [4]. Parce que l'audience et le succès sont encore « trop aléatoires ».
Internet serait-il le nouvel espace de liberté des créateurs ? Yves Boisset en doute. S'il reconnaît au web, un « formidable pouvoir » pour des « trucs marrants » comme
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