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Pour un changement de paradigme du droit des affaires
Valérie Bugault
10 juin 2010
La perte de cohésion du « droit » résulte de l’intrusion rapide et peu scrupuleuse de la conception anglo-saxonne de la loi dans notre univers juridique, notamment par le biais du lobbying. Jusqu’à cette intrusion, le système de droit français était conçu comme un ensemble cohérent et hiérarchisé de règles, dont la perfection historique date de 1804, avènement de notre fameux Code civil (ou Code Napoléon), souvent vanté et exporté.
Que le mélange des systèmes juridiques en vigueur ait précédé l’avènement du grand capital, en étant son instrument, ou qu’il n’ait fait que le faciliter, à son insu, importe finalement peu aujourd’hui. Le résultat, quoiqu’il en soit, est et reste la prise de pouvoir législative et politique par le grand capital. La suite est connue : de recherches de profits maximum en évasions fiscales bien organisées et réussies, le capitalisme a tôt fait de se transformer en « financiarisme » (néologisme évocateur), entraînant dans son sillage les dérives que l’on connaît et, pour finir, son autodestruction programmée.
Une succession d’événements, parmi lesquels l’instauration du régime juridique et fiscal dit des « stock options » et l’introduction de la fiducie (qui n’est autre que la transposition en droit interne du trust anglo-saxon, si utile aux paradis fiscaux), a finalement permis le triomphe de l’esprit « d’actionnariat » et la légitimation de la dominance du financier sur le politique. Le court-termisme inhérent à l’esprit d’actionnariat tient désormais lieu à la fois de politique et de stratégie. Heureusement secondé par l’instrumentalisation de l’éducation et des médias, cet esprit d’actionnariat a bientôt envahi tous les niveaux de la société, devenant le modèle à suivre, celui qui ouvre la voie de « l’ascenseur social ». Si quelqu’un avait eu l’idée de regarder cet ascenseur, il se serait pourtant vite aperçu de son immobilité et n’aurait pas tardé à conclure à une panne définitive. Seule la force de la croyance (en la toute-puissance du marché), qui balaye tout sur son passage, a rendu possible l’aveuglement collectif.
La complexité sans cesse croissante du droit en général et du droit de l’entreprise en particulier
S’agissant du droit de l’entreprise, le point essentiel à noter est que la multiplicité des structures juridiques et leurs différents régimes juridique, fiscal, social sans oublier comptable¹ favorisent les très grosses structures au détriment des petits entrepreneurs et sont, par essence, des facteurs anticoncurrentiels.
Les entreprises multinationales, au premier rang desquelles figurent les banques, utilisent et initient les méandres législatifs dans l’objectif de faire échapper, le plus possible, leurs bénéfices sans cesse croissants aux impositions étatiques. D’une part, le siège social des groupes est judicieusement localisé, d’autre part, en effectuant des restructurations « prix de transfert », les multinationales répartissent les activités du groupe en fonction de leur nature dans les Etats assurant le régime juridique et fiscal le plus accueillant à telle ou telle activité. Le tout assurant le maximum de profits aux multinationales ; profits répartis entre actionnaires et évasion fiscale (avant et/ou après répartition). Entre évasion et optimisation, ces entreprises ont acquis un statut extraterritorial et ne rendent véritablement de comptes à personne. La notion d’entreprise multinationale est ainsi devenue l’ennemie des Etats et, par voie de conséquence, des peuples.
Le développement croissant, tatillon et déraisonnable des subtilités juridiques, fiscales, comptables et sociales sert en réalité de vitrine présentable à toutes sortes de pratiques, malversations légales ou non, tendant à faire échapper les bénéfices des plus grosses entreprises à l’impôt ou à rendre présentables des bilans qui ne le sont pas. En ce sens, le développement immodéré des règles a non seulement permis l’évasion fiscale des plus grosses entreprises (notamment les entreprises financières) mais a aussi eu, dans le même temps, pour effet de rendre a priori coupables les petites structures : coupables de ne pas respecter la loi, d’oublier des délais, de croire, de bonne foi, entrer dans telle catégorie alors que « les services » les font entrer dans une autre etc., le tout assorti de pénalités. Les casuistes, héros des temps modernes, s’en donnent à cœur joie : ce qui est particulièrement vrai en droit fiscal mais s’applique maintenant aussi à toutes les branches du droit.
Ce mouvement de « technicité » a finalement atteint son objectif qui était d’entourer les flux mondiaux de capitaux et de marchandises de l’opacité la plus parfaite, pendant que l’attention était détournée, en interne, sur les prétendues illégalités des petites entreprises et, plus généralement, des « petits citoyens », « petits contribuables », sans oublier les « petits non citoyens » et « petits non contribuables ». Le phénomène de complexification de la règle s’avère en définitive être le moyen indispensable de la concentration des capitaux dans quelques mains bien avisées.
Le caractère non immuable du droit de l’entreprise : « ce qui est » n’a pas toujours été et ne sera pas toujours…
Ce phénomène de complexification du droit n’a pu se développer qu’à la faveur de la perte d’intégrité du législateur, vendu au plus offrant. Le législateur en cause est d’ailleurs difficile à cerner : les textes votés par le pouvoir législatif sont en réalité en très grande partie issus des différents ministères (les projets de lois), quand ils ne sont pas directement initiés par l’Elysée, sièges du pouvoir exécutif, sans toutefois être à l’abri de l’intervention de l’un ou de plusieurs parlementaires zélés (pouvoir législatif), à l’occasion soit d’une rare initiative (proposition de loi) parlementaire, soit d’un ou de plusieurs amendements. Notons au passage la violation officielle du principe de séparation des pouvoirs sans laquelle, pourtant, aucune constitution ne vaut (article XVI de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 en préambule à la constitution de la Vème République).
Par ailleurs, les projets de lois sont aujourd’hui loin d’être tous contrôlés par le Conseil d’Etat avant leur passage devant les Assemblées. C’est ainsi que les lois fourre-tout qui se sont multipliées ces dernières années ont été des moyens très efficaces de réformes informes et anonymes, le parfait vecteur de l’instrumentalisation du droit au profit du grand capital.
Le contexte brouillon de la création des textes est favorisé et aggravé par les possibilités suivantes :
- vote par un nombre de parlementaires réduit à sa plus simple expression, éventuellement à une période propice de l’année ;
- vote très rapide, faisant éventuellement suite à de longs débats ayant porté sur un autre sujet, à l’occasion d’un amendement de dernière minute.
Dans ce contexte, il devient très difficile au citoyen contribuable de distinguer la personne ou le groupe de personnes à l’origine de telle ou telle règle ; seul l’intérêt à défendre finit par apparaître aux yeux de tous, longtemps après le vote de ladite loi et à l’occasion de sa mise en application. Et nous ne parlons ici que des textes internes, et non des textes européens qui s’appliquent chez nous, votés (issus, encore rarement, du parlement de Strasbourg) ou non (issus de la commission).
Il est toujours possible de revenir en arrière, mais il faudrait pour ce faire que les peuples se réapproprient les valeurs aujourd’hui perçues comme surannées d’intégrité et de courage.
Il est aujourd’hui devenu urgent de préparer l’après-capitalisme décliné en « financiarisme ». Cet après-capitalisme se décline en une refonte du système des valeurs et une refonte de l’ordre civil. Comme le disait Ripert en 1951 :« On ne supprimera pas (le capitalisme) si rien n’a été préparé de ce qui pourrait le remplacer. Ce n’est pas en substituant un capitalisme d’Etat au capitalisme privé que l’on détruira l’esprit qui anime notre société toute entière… c’est bien un problème politique qui se pose… Le régime capitaliste est lié à un ordre civil. Qui veut le détruire, doit imaginer un autre ordre, c’est-à-dire d’autres règles, d’autres institutions ».²
Or, l’entreprise est aujourd’hui au premier plan de l’ordre civil, commençons donc par la réformer. S’agissant de la conception juridique actuelle de l’entreprise, rien de « ce qui est » n’est immuable, pas même la distinction, souvent détournée en pratique, entre société et association. En réalité, toutes ces structures ont des points communs, qui sont en même temps des besoins communs, essentiels. Besoins communs mis, par exemple, en exergue par la notion nouvelle d’EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée).
Le détail des points communs à toute « entreprise » (au sens large) est simple : la réalisation d’une activité par des hommes qui travaillent, sous la direction éclairée d’autres hommes, le tout nécessitant des moyens matériels et financiers ; l’ensemble devant relever, comme toute construction humaine, d’un édifice équilibré assorti de contre-pouvoirs afin de parer aux éventuelles dérives d’un groupe par rapport à un autre. La question de la propriété de l’entreprise entre dans l’analyse des contre-pouvoirs à mettre en œuvre au regard de l’utilité sociale du rôle de chaque participant à l’entreprise.
L’entreprise est en effet une organisation sociale qui joue un rôle non seulement économique mais également sociétal : celui d’organiser, au niveau d’une société donnée, les modalités d’une activité afin de la rendre la plus sereine possible, ce qui passe par un nécessaire équilibrage des pouvoirs des participants à « l’activité » ; l’équité et l’équilibre sont en réalité les seuls barrages contre le chaos et la destruction.
On doit définitivement cesser de considérer l’entreprise comme le moyen d’amasser du capital : la chose doit être claire pour tous et entendue par tous.
Conclusion
Vous avez compris cher lecteur que ce texte n’est pas un plaidoyer pour « plus de droit » mais au contraire pour « mieux de droit ».
Il est plus que temps aujourd’hui d’observer, au regard du bien commun, une séparation claire des règles entre l’essentiel et l’accessoire, entre l’utile et le superflu, si propre à se transformer en matière polluante hautement inflammable.
Le peuple a ici une place à reprendre, place qu’il a depuis longtemps perdue et que les moyens modernes de communication lui permettraient aujourd’hui de réinvestir. Les grands choix de société doivent, sous peine de débordements violents, absolument être validés par ceux auxquels ils s’appliqueront.
Il importe par ailleurs de laisser à l’Homme, en particulier celui qui a des idées à mettre en œuvre, le maximum de liberté associé à un maximum de responsabilité. Cet objectif nécessite la refondation d’un cadre juridique, aussi bien au niveau du droit public qu’à celui du droit privé, de nature à garantir la sécurité juridique par l’organisation de contrepouvoirs effectifs ; tout ne peut et ne doit s’acheter, au même titre que tout ne peut et ne doit être considéré comme une « exception ».
La liberté de l’Homme se décline en liberté de penser, de s’exprimer, de pratiquer (le plus sereinement possible) l’activité qui lui convient au moment qui lui convient, et de se déplacer.
La liberté ainsi conçue a été et doit redevenir intangible et imprescriptible, elle est et doit rester une valeur qui ne se marchande pas. Insistons également sur le fait qu’il ne peut être question de dissocier la liberté de la responsabilité ; point de liberté sans responsabilité. Voilà une autre vérité éternelle, à respecter en tous lieux et de tout temps.
Pour finir, abordons l’essentiel : il ne semble ni nécessaire ni pertinent de supprimer la notion de propriété privée. L’histoire de l’URSS a amplement démontré que sans propriété privée, point d’idée mise en œuvre ; l’absence de motivation personnelle engendre finalement la fin du développement de la « collectivité ». Il importe de tirer, collectivement, des leçons des expériences passées : c’est à ce prix que nous progresserons, que la société progressera.
Si la propriété privée doit être respectée, elle doit en revanche absolument être limitée et encadrée. L’accaparement, que ce soit de biens matériels, immatériels ou de monnaie, qui est l’excès de propriété privée, doit être définitivement érigé en crime.
Il vous est ainsi proposé, à tous, de réfléchir à la société de demain, qui devra, si l’on souhaite le rétablissement de la démocratie :
- opérer un rééquilibrage des forces sociales à l’œuvre dans le concept d’entreprise ;
- supprimer les excès du droit de propriété en gardant à l’esprit que nul droit ne vaut sans devoir.
¹ Le régime comptable est plus attaché à la nature des opérations qu’à la structure juridique mais la tendance est la même que pour le droit : multiplication à l’infini des cas particuliers et développement de la casuistique
² Aspects juridiques du capitalisme moderne, n°151 p.346 et 347
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Franco-German relations cool over eurozone crisis
John Lichfield in Paris
9 June 2010
Minutes before President Nicolas Sarkozy was to leave to fly to Berlin for a Franco-German summit, Chancellor Angela Merkel telephoned to postpone the meeting.
Officially, the cancellation was forced by a timetabling problem. Chancellor Merkel was embroiled in her emergency plans to cut €80bn (£66bn) from the German budget by 2014. In truth, the postponement is evidence that the Franco-German partnership, which has steered the European Union for half a century, is struggling to survive one of the worst crises in the history of the EU.
The Merkel-Sarkozy meeting was supposed to agree a joint position on the deficit crisis threatening the European single currency before a European summit in Brussels next Thursday. Officials in both France and Germany say that the two countries were so deeply divided that a meeting on Monday would have been pointless and failure might have caused a further market backlash against the euro.
Efforts will be made to identify at least some common ground before the postponed Franco-German summit takes place in Berlin next Monday. Personal relations between the two leaders are now so strained, however, that the new EU Council President, Herman van Rompuy, has had to be employed on occasion as a peacemaker and message-carrier.
Both Chancellor Merkel and President Sarkozy say that there should be a "European economic government" to narrow policy differences between countries using the euro and enforce the deficit and debt rules which have been trampled by all countries, save Luxembourg, in recent years. Paris and Berlin remain deeply opposed, however, on what "European economic government" should mean.
President Sarkozy wants to give increased political power to the informal eurogroup of the 16 countries which use the single currency. This consultative forum would become a de facto economic government overseeing national fiscal and spending policies.
Chancellor Merkel detests the idea of a powerful eurogroup dictating budget policy to Berlin. She wants decisions to be made by all 27 EU countries. She also wants tougher deficit-enforcing rules, including the power to force backsliding countries to go bankrupt rather than demand financial help from their partners. France hates this idea.
The Franco-German disagreement is not the first in the last 50 years but is potentially the most serious. The personal chemistry between the mercurial, tactile President Sarkozy and the stolid, unemotional Chancellor Merkel has never been good. But there has also been a wider divergence in German and French viewpoints and interests, which has been exposed by the debt and euro crisis.
The French press, and some French politicians, accuse the Germans of taking a narrow, national approach, which has, in the end, made the crisis worse. After refusing for many weeks to join a concerted but limited Greek bailout, Chancellor Merkel was forced by market pressure to agree a much larger, €500bn aid mechanism, they point out. The German press and politicians, no longer think in European terms, the French complain.
In Germany, France is accused of conspiring with the (French) head of the European central bank, Jean-Claude Trichet, and the French head of the International Monetary Fund, Dominique Strauss-Khan. Paris has bullied Ms Merkel, the German press complains, into conceding ground which suits French interests.
Reports in the Spanish press that Mr Sarkozy threatened to pull France out of the euro last month unless Ms Merkel conceded on the bailout mechanism for Greece have been denied in both Paris and Madrid. In the German press, the reports are taken to be "metaphorically" true, if not strictly accurate.
The chances of any agreement on long-term reforms of the political machinery of the euro next week are slender, French officials say. "The negotiations have not been going well," one senior French official told Le Monde. "The Germans have not been prepared to move forward."
Even the €80bn package of spending cuts agreed by Ms Merkel is an irritation and an embarrassment to Paris. France's budget deficit – 8 per cent of GDP – is higher than Germany's but Paris has so far announced only €15bn in cuts and an uncosted plan to bring its deficit within the official euroland limit of 3 per cent by 2013.
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UK rejects EU budget scrutiny plan
European commission's demand for advance vetting of national tax and spending plans is flatly rejected by British government
Ian Traynor in Brussels
8 June 2010
Britain rejected EU moves towards prior scrutiny by Brussels of national budgets today, insisting that only the House of Commons would be allowed to vet British tax and spending plans.
Under action aimed at boosting budgetary rigour and avoiding recurring Greek-style debt crises, the European commission and Herman van Rompuy, president of the European Council, are demanding that all 27 EU governments submit their budgets for "peer review" in Brussels before going before their legislatures.
Late on Monday, after chairing a meeting in Luxembourg of finance officials from the 27 countries, Van Rompuy announced a "strong convergence of views" on the need for vetting of budgets and phased penalties for countries breaching deficit and debt ceilings. "Rapid progress can be made. That was clear from the large consensus on all the main points," he said.
The Cameron-Clegg government promptly contradicted him. British officials insisted that the government would have no truck with the peer review. If the budget vetting went ahead, Cameron would be vulnerable to charges that he had allowed crucial sovereign powers to be transferred to the EU, something that he opposed.
Mark Hoban, financial secretary to the Treasury, attended the Luxembourg meeting for the chancellor, George Osborne. He said: "The budget will be presented to parliament first. There is no question of anyone other than MPs seeing it first. Once the chancellor has presented it to parliament, it is of course publicly available."
Van Rompuy and other European leaders want budget drafts to go before EU finance ministers and be examined by commission experts. "Not to be checked in detail or to be decided upon by the European institutions – that is the prerogative of the national parliaments," he said. "However, the main assumptions underlying the plans, like levels of growth or inflation, would be examined … A government presenting a budgetary plan with a high deficit will have to justify itself."
The council president, who heads a "task force" of officials from the 27 states on how to boost Europe's "economic governance", will report on the plan next week at an EU summit, meaning Cameron could be in for a bruising debut in Brussels.
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